A quand remonte la dernière lettre que vous ayez écrite ? Des mois ? Des années ? Lilwen Letondeur, elle, n'a jamais arrêté. A 18 ans, cette habitante de Bois-Colombes (Hauts-de-Seine) en a même fait le moteur de son association Appelle ta Jacqueline.
Le principe est simple : des jeunes écrivent des lettres à des personnes âgées que l'on sait isolées. Lilwen centralise les missives et les confie au centre communal d'action sociale (CCAS) de la ville, qui les oriente vers les destinataires adéquats.
L'étudiante, qui est aujourd'hui en classe préparatoire de lettres à Paris, n'est jamais restée les deux pieds dans le même sabot. Après avoir été membre du conseil municipal des jeunes de 2015 à 2018, elle a rejoint une unité secouriste de la Croix-Rouge locale.
C'est dans ce cadre qu'elle a participé l'an passé à une campagne d'appels auprès de personnes âgées isolées. « D'habitude, les discussions duraient une dizaine de minutes maximum et puis, un jour, j'ai eu Jacqueline en ligne », se souvient la jeune femme.
«L'idée est de lancer des ponts»
Avec cette retraitée de 93 ans, les discussions durent plus d'une heure. « J'ai préféré lui parler par lettre et elle me répondait au téléphone. C'était curieux », poursuit Lilwen. Cette histoire, elle la raconte dans une vidéo sur le réseau TikTok. D'autres jeunes la contactent alors.
Dans le même temps, elle se rapproche de son grand-père. « Une de ses dernières phrases, avant son décès en novembre, a été pour me dire de ne jamais abandonner l'action. J'ai décidé de lutter à mon échelle pour ces personnes âgées, confie-t-elle d'une voix plus dure. L'idée est de lancer des ponts. »
En quelques semaines, elle reçoit plus d'une cinquantaine de lettres venues de toute la France. A la plume, uniquement des filles âgées de 13 à 30 ans. Aujourd'hui, Appelle ta Jacqueline totalise 34 membres.
«Cela m'a replongé dans mes souvenirs…»
La forme n'a pas été choisie au hasard. La lettre manuscrite implique de réfléchir avant de rédiger, de construire ce qu'on raconte, de faire attention à la syntaxe, la grammaire, l'orthographe…
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« Je leur rappelle de ne pas employer les abréviations qu'ailleurs on utilise tout le temps, insiste Lilwen. Une personne âgée ne sait pas ce que LOL, TKT ou OKLM signifie ! » Sur les longues lettres, l'écriture appliquée, à l'encre parfois rose ou violette, est émaillée de correcteur blanc. A l'ancienne !
Liliane, dont la famille réside en province, a reçu l'une des lettres. « J'habite une résidence pour personnes âgées, indique cette femme de 82 ans qui habite Bois-Colombes. J'ai reçu une lettre d'une jeune fille de 12 ans, Tlati. Elle me parlait d'elle, de son goût pour la nature, les animaux… Il y avait des photos aussi… J'ai été surprise de recevoir un courrier de quelqu'un que je ne connais pas. C'est tellement gentil. »
Liliane ne compte pas en rester là. « On va voir si une correspondance s'enclenche mais j'ai répondu. Une lettre n'a rien à voir avec un message ou un coup de fil. Cela m'a replongée dans mes souvenirs, quand on n'avait que ce moyen pour communiquer. Et puis, cette fille a une écriture si jolie. En plus, elle n'a fait aucune faute d'orthographe ! »