On devine les sourires derrière les masques. Le rassemblement de ce dimanche à Dugny, prévu avant la décision de justice tombée mardi, a un petit goût de victoire. « C’est une première étape », se félicite Jean-Marie Baty, le président du Mouvement national de lutte pour l’environnement (MNLE) pour la Seine-Saint-Denis.
L’association est à l’origine, avec le Collectif pour le Triangle de Gonesse et 36 requérants individuels, d’un recours en référé contre la construction du village des médias sur le terrain de l’Aire des vents, dans le cadre des Jeux olympiques 2024. Le projet de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solidéo) prévoit la construction de 1300 logements, dont 700 en 2024 pour l’hébergement des journalistes.
Mais mardi, la cour administrative d’appel de Paris a suspendu une partie de l’autorisation environnementale, au motif qu’elle ne satisfait pas, en l’état, les dispositions du code de l’environnement. « Ce ne sont pas les JO qui sont en cause, mais bien tous ces logements sur des espaces verts, explique Yves Chaumard, du MNLE. C’est une densification dont on ne veut pas. D’autant qu’on doute que les journalistes y logeront tant le lieu est excentré. »
« On est obligés de faire des appels aux dons pour financer la procédure »
« Le cahier des charges du CIO (NDLR : Comité international olympique) ne demande absolument pas de construire un cluster des médias, c’est la France qui l’a décidé mais il n’y a pas d’impérieuse nécessité, analyse Jean-Yves, un des 36 requérants, qui a assisté à l’audience. Or, on ne peut déroger aux règles de protection environnementale que s’il y a nécessité de bâtir un projet et qu’il n’y a pas d’alternative. Mais nous proposons une alternative (un terrain en bordure du site). »
Après s’être longuement opposé, avec succès, au projet de « Central Park » – il était question de bâtir 24000 logements en bordure du parc Georges-Valbon –, ce militant communiste de Saint-Denis s’est lancé dans ce nouveau combat avec conviction.
« On peut être très très satisfaits de ce qu’on a gagné. C’est tellement le pot de terre contre le pot de fer, David contre Goliath. On est un petit mouvement, on est obligés de faire des appels aux dons pour financer la procédure. En face, ils drainent des milliards. Mais on a conscience que, face à une décision stupide, c’est un combat qu’il faut mener, même s’il peut sembler perdu d’avance », juge Jean-Yves.
Un combat « difficile » pour espérer a minima des modifications
Même détermination chez Josselyne, une habitante de Dugny, et son amie Monique, toutes deux membres de l’association Femmes solidaires. « Ici, c’est un lieu qui permet de faire un break par rapport à la ville. Quand je prends mon vélo pour aller à Bobigny, ça me fait trois minutes où j’échappe aux pots d’échappement. Ça me fait trois minutes à voir de la verdure, des lapins, à ne pas être dans la foule, décrit Josselyne. Ils disent que cet espace ne sert à personne, ce n’est pas vrai ! Il y a des gens qui le fréquentent : le seul banc du parc est toujours occupé par des jeunes du lycée qui se bécotent ! Il y a des gens qui jouent au foot, d’autres qui promènent leur chien. »
Elle poursuit : « On est le département le plus pauvre, le moins oxygéné, le plus marqué par les problèmes d’industrialisation et maintenant le chômage. Pour une fois qu’on a un espace verdoyant, tranquille, qu’on nous le laisse ! »
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Que pense-t-elle de leurs chances de succès ? « Ça va être difficile, soupire-t-elle. En face de nous, il y a des forces tellement organisées… On est inquiètes sur les possibilités d’aboutir. A minima, on laissera une trace. » « On obtiendra peut-être des modifications », avance son amie Monique.
Après le recours en référé, reste un recours en annulation, toujours en cours d’instruction. Mercredi, la Solidéo annonçait son intention de retravailler son projet.