« Ils ont les chocottes », plaisante un conseiller ministériel. Pourtant, l’affaire est sérieuse. En maintenant les élections régionales et départementales en juin prochain, l’exécutif ne redoute pas uniquement le risque sanitaire, mais le risque pénal aussi. « Entre nous, personne n’en parle. Mais évidemment que ça peut peser », alerte un poids lourd du gouvernement, en évoquant le « traumatisme » des dernières municipales, avec ces plaintes lancées par des élus et des candidats qui avaient été contaminés pendant la campagne.
Une instruction toujours en cours pour Buzyn, Véran et Philippe
Et même un déferlement de procédures contre la gestion de la crise sanitaire en général, qui a conduit à la mise en cause de deux ministres et un Premier ministre devant la Cour de justice de la République : Agnès Buzyn, Olivier Véran et Edouard Philippe. Tous les trois font aujourd’hui l’objet d’une information judiciaire, notamment pour « mise en danger de la vie d’autrui » et « homicide involontaire », avec des perquisitions à l’automne dernier qui en ont glacé plus d’un au sommet de l’Etat. Surtout que la clôture de l’instruction est programmée au premier trimestre 2022… juste avant la présidentielle.
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Jean Castex ne l’ignore pas. En privé, l’actuel Premier ministre admet avoir « intériorisé » la possibilité d’avoir à subir un jour des poursuites. « Mais si je commence à penser à ma responsabilité personnelle ou pénale, je ne suis pas sûr que je prendrai les décisions dans l’intérêt du pays », défendait-il fin novembre devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale. En consultant les maires ce week-end sur l’organisation des élections en juin, et en s’exprimant ce mardi devant les parlementaires, Jean Castex entend bien recueillir tous les avis possibles, « et ainsi que chacun soit face à ses responsabilités », glisse un député LREM qui a échangé avec lui ce week-end. « Le risque judiciaire existe. Ce serait faux de dire qu’il balaie cela d’un revers de la main. Mais ce n’est pas non plus au cœur de nos échanges, et ce n’est pas cela qui appuiera sa décision », défend Matignon.
Et le Premier ministre n’est potentiellement pas le seul concerné. Les maires aussi. Notamment avec le spectre de l’article 121-3 du Code pénal, relatif à la mise en danger délibérée de la personne d’autrui pour les élus. « Si certains maires font en ce moment pression pour un report, ça n’est pas que pour des raisons logistiques sanitaires. Mais aussi parce que, sur le terrain, ce sont eux qui essuient les craintes de leurs habitants, jure un élu MoDem. Déjà qu’ils sont en permanence au four et moulin. Si en plus c’est pour avoir des plaintes sur le dos... »