Washington se prépare aider l'industrie américaine à sécuriser sa chaîne d'approvisionnement en composants électroniques critiques. Un plan de 50 milliards de dollars est en gestation, alors que pour résoudre le problème à court terme de pénurie, Intel négocie avec les constructeurs automobiles pour fabriquer d'ici 6 à 9 mois, des puces spécifiquement adaptées à leurs besoins.
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Les sujets sur lesquels républicains et démocrates sont d'accord sont rarissimes à Washington ces temps-ci. S'il en est un toutefois, c'est bien celui de l'urgence de contrer la Chine, puissance accusée de politique industrielle et commerciale hégémonique. Les élus américains et la Maison blanche sont convaincus que Pékin cherche à user de la dépendance des industries occidentales à l'égard de composants électroniques «made in China» pour affaiblir les États-Unis et leurs alliés.
Sommet virtuel
Dans ce contexte, à l'occasion d'un «sommet virtuel» lundi à la Maison blanche, réunissant les dirigeants des leaders de l'industrie américaine des semi-conducteurs, ainsi que leurs plus gros clients, Joe Biden juge probable l'allocation de 50 milliards de dollars d'aides fédérales aux fabricants de puces électroniques dont la pénurie soudaine handicape l'industrie américaine. Les crédits serviraient à financer non seulement des investissements dans des usines de fabrication des puces, mais aussi des efforts de recherche et développement.
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Plusieurs chaînes de production des constructeurs automobile américains, comme General Motors et Ford, se trouvent déjà arrêtées, faute de puces électroniques indispensables aux véhicules modernes. Rien que cette année 1, 3 million de voitures et camionnettes pick-up ne pourront sortir des usines américaines, faute de ces composants. Le même problème affecte des constructeurs en Europe.
Une loi spécifique pour contrer la Chine
Les géants de Détroit plaident pour qu'un quart des 50 milliards de dollars de crédits en discussion soit alloué à la fabrication de ces puces qui leur manquent cruellement aujourd'hui. La Maison blanche comprend leur position, mais pour l'instant se garde de promettre comment le gâteau de 50 milliards pourrait être découpé. La politique industrielle américaine a toujours été prudente de ne pas privilégier des entreprises spécifiques, mais plutôt une filière.
Le moyen législatif par lequel ces aides seront accordées n'est pas arrêté non plus. Le Président Biden voudrait que les crédits soient incorporés à son plan massif d'investissements publics en infrastructures de plus de 2000 milliards de dollars. Or cette approche pourrait grandement ralentir les choses, car les républicains contestent l'inclusion dans le plan de multiples programmes sociaux qui n'ont rien à voir avec l'infrastructure au sein traditionnel du terme. Forts de la moitié des sièges au sénat, ils préféreraient que le plan d'aide à l'industrie des semi-conducteurs, soit au cœur d'une loi distincte visant spécifiquement la Chine. Elle pourrait alors être adoptée très rapidement.
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Joe Biden lui-même, depuis son bureau de la Maison blanche, a lu aux participants au «sommet», une lettre signée par 23 sénateurs et 42 représentants des deux partis, soutenant le plan de 50 milliards de dollars. La missive souligne que «le Parti communiste chinois de manière agressive prévoit de réorienter et de dominer la chaîne de production de semi-conducteurs».
Intel propose de fabriquer les puces des fournisseurs de Détroit
La question de la souveraineté économique est un aspect de la sécurité nationale. Cela explique que le conseiller de Joe Biden pour la sécurité nationale, Jake Sullivan, ait participé au sommet. Brian Deese, directeur du Conseil économique national, mais aussi la Secrétaire au commerce, Gina Raimondo en étaient également. Les dirigeants d'Intel, Micron Technology, Taiwan Semiconductor Manufacturing (TSMC) et Samsung aussi. Parmi les industriels acheteurs de composants, on trouvait les patrons de GM, Ford, Cummins pour l'industrie automobile, mais aussi Medtronic (appareils médicaux), Northrop Grumman (aéronautique militaire), ou encore ceux de Dell Technologies.
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